Ceci est la retranscription d’une vidéo Youtube de Fritz Perls. On le voit animer et expliquer des concepts de Gestalt-thérapie, notamment l’awareness (définition à découvrir ici).
Ce que vous allez lire est la version écrite des sous-titres de la vidéo. Je vous invite à visionner la vidéo ici :
Je vous préviens : la vidéo semble commencer en plein milieu d’une phrase
Le Hot seat
P (=Perls) : … mais dans les deux cas nous avons un point commun.
Dans les deux cas, nous vivons avec un processus d’apprentissage. L’apprentissage a été mal compris. Ma définition de l’apprentissage, c’est découvrir que quelque chose est possible. Ce n’est pas seulement absorber une information, et ce que je veux, c’est vous montrer ici qu’il est possible de découvrir les façons donc vous pouvez croitre et développer votre potentiel et comment les difficultés de vos vies …
Bien sûr on ne peut pas faire ça dans un bref atelier.
Mais peut-être que je peux planter quelques graines, ôter quelques-uns des couvercles qui vont ouvrir de nouvelles possibilités. Laissez-moi le répéter encore une fois :
Apprendre, c’est découvrir que quelque chose est possible.
Nous perdons la plus grande partie de notre énergie pour des jeux auto destructeurs ou d’auto prévention. J’ai déjà mentionné que nous faisons cela pour nous prémunir de la croissance. A l’instant même, quelque chose de désagréable survient. À cet instant nous devenons phobiques, nous fuyons, nous nous désensibilisons. Nous faisons toutes sortes de choses pour éviter le processus de croissance. Encore une fois nous devons aller plus loin, et voir que la souffrance névrotique c’est une souffrance en imagination, souffrir en fantasme. Quelqu’un vous traite de fils de pute, et vous pensez que vous souffrez, vous êtes blessé, mais ne souffrez pas ! Il n’y a pas de contusion, pas de blessure. C’est ce qu’on appelle votre égo ou votre vanité, qui est blessé. On peut aller plus loin : quand vous dites que vous êtes blessé, vous vous sentez vindicatif et vous voulez blesser l’autre personne.
Alors ce que j’aimerais faire pour commencer, c’est demander à quelques-uns d’entre vous de venir sur le hot seat pour travailler sur les bases phénoménologiques, ce qui signifie sur l’awareness du processus en cours.
- Si vous vivez dans le présent, vous utilisez tout ce qui est disponible
- Si vous vivez dans votre ordinateur dans votre machine à penser, ou dans les réponses obsolètes qui sont une manière rigide de faire face à la vie, vous restez coincé.
Alors voyons ça avec quelques-uns d’entre vous. Qui a envie de venir ?

Alors regardons ça de façon très primaire. Si nous nous fixons un petit peu sur tout ça, de manière un peu rigide et un peu pompeuse, dans un premier temps, vous allez bientôt voir la signification de tout ça.
Commençons par la phrase : « maintenant je suis conscient de … »
Volontaire n°1

Volontaire n°1 (= V01) : Maintenant je suis conscient d’une tension dans mon bras droit. Maintenant je suis conscient de …. Ces visages qui regardent vers moi. Je suis conscient de … vous, Fritz, et je suis toujours conscient de ma … main.
Et maintenant je suis conscient de changer de position pour une position plus relax. Maintenant je suis conscient d’une boîte devant moi.
Maintenant je suis consciente d’attendre d’être soulagé de la pression.
Perls : Vous voyez, à ce moment, vous avez sauté dans le futur. Le verbe « attendre » signifie qu’il a arrêté d’être conscient de ce qui se passe. Sauf si nous réduisons maintenant son anticipation au processus en cours. Et si nous regardons ce « comment » avec Christophe, le « comment » recouvre les façons d’avoir un comportement. Comment faites-vous l’expérience d’attendre ?
V01 : Je fais l’expérience d’attendre comme une forte tension ici. Une tension dans tout mon corps plus une certaine peur de l’absence d’expression qui commence à recouvrir ma pensée.
Perls : Oui. Je dois ajouter ce dont je suis conscient. Je suis conscient que vous souriez beaucoup et vous parlez de tensions désagréables…… Vous continuez, et pour moi c’est inconsistant.

V01 : C’est peut-être vrai, je suppose que c’est une arme.
Perls : Que faites-vous maintenant ?
V01 : J’intellectualise ?
Perls : Oui, et vous vous défendez.
V01 : Oui.
Perls : Alors peut être que ma remarque vous a déplu ?
V01 : Heu … peut être un petit peu, oui.
Perls : Êtes-vous conscient de votre sourire ?
V01 : Vous n’aimez pas que je sourie ?
Perls : Étiez-vous conscient de ce que vous faites avec cette phrase ?
V01 : Je pense que j’exprimais peut-être un peu d’hostilité.
Perls : Alors vous m’avez eu (doute de si c est Perls qui dit ça).
V01 : Je ne voulais pas vous attaquer.
Perls : Maintenant, encore une fois … Êtes-vous conscient de vous mettre sur la défensive à nouveau ?
V01 : Oui, je pense avoir une nature très défensive.
Volontaire n°2
P : Ok, au suivant.
Je veux juste vous montrer des exemples pour renforcer les bases de l’awareness. Vous voyez, ce qu’on fait c’est simplement de nous familiariser avec le processus en cours ou avec l’awareness, et comment les personnes évitent l’engagement total dans ce qui est là. Nous pouvons maintenant aller plus loin et regarder : avec quoi êtes-vous en contact ? Il y a trois possibilités :
- Vous pouvez être en contact avec le monde,
- Vous pouvez être en contact avec vous-même,
- Vous pouvez être en contact avec votre vie imaginaire, ou zone médiane a d’abord été découverte par Freud sous le nom de complexe et c’est une zone médiane qui est la part folle de nous-mêmes. C’est un fantasme, à chaque fois que ce fantasme est pris pour une chose réelle.

Vous savez, le fou qui dit : « je suis Napoléon », qui se prend vraiment pour Napoléon. Si je dis « j’aimerais être Napoléon », vous ne me prendriez pas pour un fou, mais si je dis : « Je suis Napoléon « ! » » Allez, marchez sur Austerlitz ! » ou je ne sais quoi … Vous vous diriez : quel étrange comportement ! Et particulièrement dans cette zone-là où nous sommes complétement fous, qui est la zone de nos rêves. Et vous voyez, les rêves, la zone médiane a pris tellement d’importance dans notre vie que nous avons perdu le contact avec la réalité. Cette réalité, le monde, ou cette autre réalité qui est notre self authentique.
Voulez-vous commencer cette expérimentation « Maintenant je suis conscient de … » ?

V02 : Je suis conscient que votre attention est tournée vers moi, que ma voix semble tremblante. Hum … mon esprit est divisé entre mon imagination et être conscient de mon corps.
Perls : Mon esprit est divisé entre l’imagination et le corps. Pour moi, l’esprit est imagination. Quand vous dite « mon esprit est divisé » vous voulez sans doute dire : « mon attention est divisée »
V02 : Oui, c’est exact. Si mon corps est dans mon esprit, mon esprit est sur mon corps, c’est là qu’est mon attention. Je sens toujours un frémissement, comme des frissons dans la poitrine. Je sens que ma main se balade un peu. Je montre du doigt ma poitrine. Le frémissement monte dans ma gorge. Je suis conscient de fixer le tapis du regard. Les pieds des gens bougent.
Perls : Oui. Êtes aussi conscient que vous évitez de regarder ? De me regarder, de regarder les gens ?
V02 : Oui. Je ne regarde pas … Jusqu’à maintenant. Les gens semblent … très tendus, un peu suspendus mais très réels.
Perls : Pouvez-vous maintenant faire dialoguer conscience de soi et conscience du monde ? La conscience de soi est symbolisée par le mot « je » et celle du monde par le « tu ».
Je et Tu :
- S’il y a trop de « je » c’est une personne centrée sur elle-même
- S’il y a trop de « tu » il s’agit d’un paranoïaque, un agressif, un homme d’affaires ou quelque chose comme ça.
V02 : Et bien je te regarde maintenant, et plus je te regarde moins je me sens frissonner à l’intérieur (ndlr : il ne regarde pas Perls, il a l’air de causer à qqn d’autre). Quelques-uns d’entre vous semblent regarder droit vers moi, et d’autres semblent regarder du côté ou du haut de leur tête. Vous semblez bien me regarder d’en bas ou d’en haut, et Don ça semble être depuis le côté de ta tête…

Perls : Retournez maintenant à la conscience de soi
V02 : Je sens une boule de tension ici, ma bouche est sèche.
Perls : Retournez maintenant à la conscience de ce qui vous entoure
V02 : (il prend son temps) J’ai l’impression de vouloir diriger mon regard sur un ou …
Perls : Vous êtes encore dans le « Je »
V02 : Gordon, tu m’as l’air très confiant mais un peu farouche…

Perls : Oui là vous l’avez vu. Maintenant revenez à vous-même.
V02 : Hum … ça me fait sentir confiant (il sourit).
Perls : Vous voyez ? Vous obtenez une intégration. Le monde et moi sommes un. Si je vois, je ne vois pas. Le monde est juste là. Dès que je vois, je me tends, je fixe. Je fais toutes sortes de choses sauf avoir le monde ( voir le monde ? mauvaise trad ?). Ok, merci…

Volontaire n°3
Perls : … Votre nom c’est ?
Pe : Penny.

P : Ah oui, vous êtes Penny.
Pe : Heu … Je sens mon cœur battre. Mes mains sont froides. J’ai peur de jeter un regard et mon cœur continue à faire des bonds.
P : Étiez-vous consciente de la façon dont vous m’avez évité ? Vous m’avez regardé et rapidement vous avez regardé ailleurs.
Pe : (hoche de la tête pour dire oui)
P : Qu’est-ce que vous évitez quand vous me regardez ?
Pe : (elle sourit)
P : Étiez-vous consciente de sourire en me regardant ?
Pe : (hoche de la tête pour dire oui)
P : De quel genre de sourire avez-vous fait l’expérience ?
Pe : J’ai peur. J’essaie de cacher ma peur
P : Êtes-vous à l’aise avec votre peur ?
Pe : Oui. Mon cœur ne bondit plus tellement.
P : Maintenant essayons de sentir le rythme du contacter et se retirer.
Faire face et se retirer, c’est le rythme de la vie. Vous pénétrez dans le monde et vous vous retirez en vous-mêmes, vous pénétrez dans le monde et vous vous retirez en vous-même, c’est le rythme de base de la vie.
- En hiver nous nous retirons, en été nous allons vers l’extérieur.
- La nuit nous nous retirons profondément, le jour nous sommes occupés à faire face.
- Si je ne trouve pas un mot, je me retirer dans mon dictionnaire et je reviens avec le mot pour remplir les trous dans la phrase
Donc ce rythme est continu, et le « je/tu » forment ensemble une unité.
Si vous avez cette zone médiane : elle vient entre Je et Tu et vous empêche de fonctionner de manière adéquate, il y a des anticipations catastrophiques ou des complexes qui déforment votre vision du monde, etc. Nous nous occuperons de ça plus tard. Pour l’instant je veux vous faire sentir la situation de contact-retrait. Je descends le plus profondément possible en moi en m’éloignant de tout ça puis vous revenez et vous nous voyez à nouveau.
Voyons ce que ça donne si vous essayez.
Pe : Je me sens frustrée. Je veux faire quelque chose.
P : Répétez ça
Pe : Je veux faire quelque chose. (il se passe un long moment où elle a les yeux fermés)
P : Maintenant revenez. (Penny ouvre les yeux et le regarde) De quoi faites vous l’expérience ici et maintenant ?
Pe : (Elle regarde dans le vide) Les couleurs sont brillantes.
P : Pardon ?
Pe : Les couleurs sont brillantes
P : Les couleurs sont brillantes. C’est un bon symptôme. C’est ce que nous appelons en gestalt un mini satori. Elle commence à se réveiller. Vous avez remarqué que le monde devient plus réel. Les couleurs sont brillantes. Ça sonne authentique et spontané.
Volontaire n°4
P : Votre nom ?
A : Ann

P : Ann.
A : (Elle ferme les yeux) Je suis consciente de euh … une tension dans ma tête. C’est autour de ma tête, je sens comme un picotement et un serrement, comme si ma tête allait dormir, comme si mes membres allaient dormir. Comme une douleur qui brûle, aussi.
P : Maintenant retour au monde. De quoi êtes-vous consciente dans votre environnement ?
A : Je suis consciente de ce garçon ici qui semble très bon, il a l’air très confiant et compréhensif.
P : Nous arrivons à une autre condition en gestalt-thérapie. (Elle pleure) Nous ne bavardons jamais sur quelqu’un qui est là, nous essayons toujours d’établir le contact. Pouvez-vous voir le lui dire au lieu de bavarder sur lui ?
A : Je sens … Je te trouve très … bienveillant et sympathique.

P : Maintenant retirez-vous à nouveau … (long silence) Vous etiez consciente de pleurer un petit peu ?
A : Mmh … (elle acquiesce)
P : Alors pourquoi est-ce que vous ne le dites pas ?
A : Je suis consciente de pleurer …euh … de distinguer de la peine … Je sens comme une sorte de … être contrariée est chez moi, quelque chose de cassé, en quelque sorte.
P : Maintenant revenez à nous. Cette fois-ci restez avec moi. Quelle expérience faites-vous de moi ?
A : Je vous éprouve comme quelqu’un de très réel, une personne définie, assez … proche et qui est ici avec moi. Enfin pas qu’avec moi, avec tout le monde, mais qui est ici.
P : Retournez en vous encore une fois, prendre part à ce doux chagrin.
A : Je suis consciente d’une tension dans ma tête … un raidissement tendu autour de mes yeux.
P : Pouvez-vous fermer les yeux et découvrir comment vous faites ça ? Qu’est-ce que vous tendez ? Comment vous produisez votre tension ?
A : Je sens que j’attire les choses à l’intérieur, je rassemble les choses.
P : revenez à nouveau
A : Je sens le groupe comme étant ouvert.
P : oui, très bien, merci.
P : Ce sont les bases d’une expansion de l’awareness. Nous n’avons pas besoin de LSD, ni d’aucun moyen artificiel pour se transformer. Si nous produisons notre propre awareness, si nous faisons ça nous-mêmes, sans compter sur des artifices, nous avons toutes les bases de la croissance dont nous avons besoin.

// Fin de la vidéo //
Je terminerai par quelques citations de Perls provenant de cette vidéo mais aussi glanées sur ce site et que j’aime bien :
L’apprentissage, c’est découvrir que quelque chose est possible. Ce n’est pas seulement absorber une information.(…) Il est possible de découvrir les façons dont vous pouvez croitre et développer votre potentiel et comment les difficultés de vos vies …
Fritz Perls sur l’awareness
Si vous vivez dans le présent, vous utilisez tout ce qui est disponible. Si vous vivez dans votre ordinateur dans votre machine à penser, ou dans les réponses obsolètes qui sont une manière rigide de faire face à la vie, vous restez coincé.
Fritz Perls – Gestalt Thérapie
Le verbe « attendre » signifie qu’on a arrêté d’être conscient de ce qui se passe, sauf si on réduit sa propre anticipation sur la situation en cours. Pour cela la question est : Comment faites-vous l’expérience d’attendre ?
Fritz Perls avec le volontaire n°1
Si vous avez cette zone médiane (= les rêves) : elle vient entre Je et Tu et vous empêche de fonctionner de manière adéquate, il y a des anticipations catastrophiques ou des complexes qui déforment votre vision du monde, etc.
Fritz Perls
Le corps sait tout. Nous savons très peu. L’intuition est l’intelligence de l’organisme
Fritz Perls
Le corps qui est plus bavard que nous, vous pouvez développer ce sujet via l’article qui parle de la BD sur les émotions